Mis à jour le 18 juillet 2022
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A l'ombre des colombiers

Ils sont des dizaines à jalonner nos communes, font parfois concurrence au clocher en tant que repères dans le paysage rural ; ils ont une histoire longue de plusieurs siècles, des formes originales et font l’objet d’un inventaire du Parc naturel… les colombiers nous ouvrent leurs lucarnes ! L’occasion de découvrir que ces symboles passés du pouvoir ont encore un rôle à jouer dans l’identité de nos villages.

 
Article de l'Echo du Parc n°83 (février 2020)
 
Depuis l’Antiquité, les colombes - nos pigeons actuels - ont été domestiquées. On élevait d’abord ces volatiles pour des raisons alimentaires car le pigeonneau était un mets recherché ! Mais on exploitait aussi leurs formidables facultés d’orientation pour transporter des messages de façon rapide et discrète… Bien avant internet et la fibre optique, le pigeon voyageur a préfiguré le premier réseau de télécommunication ! Enfin, les élevages s’avéraient fort utiles pour l’agriculture car la fiente, appelée « colombine », était récoltée et constituait un excellent fertilisant pour les sols. La construction de colombiers s’est donc développée : en offrant un abri à ces oiseaux pour pondre et couver leurs oeufs, on s’est ainsi assuré la présence d’une manne précieuse.
Privilège seigneurial
 
Dès l’origine, le colombier est un bâtiment emblématique. Sa forme de donjon ou de tour défensive rappelle les prérogatives judiciaire et défensive des grands seigneurs locaux. En effet, le « droit de colombier » est un privilège féodal. Les colombiers que l’on voit encore aujourd’hui sont donc en majorité liés à d’anciens domaines seigneuriaux, qu’il s’agisse de corps de ferme, de châteaux ou d’abbayes. Au titre de ce privilège, les pigeons sont à l’époque une espèce protégée. Les chasser ou les attraper est passible de peine corporelle ou d’amende. Dès lors, les ravages qu’ils exercent dans les champs, sans que les paysans puissent intervenir, sont vécus comme une charge et un prélèvement féodal supplémentaire. La suppression de ce privilège sera d’ailleurs, au moment de la Révolution, l’une des revendications récurrente dans les cahiers de doléances.
Agrément au 19e siècle
 
Au 19e siècle, l’édification de colombiers est toujours une pratique réservée à l’élite. Des parisiens aisés viennent s’installer en vallée de Chevreuse avec la mode de la villégiature. Ils aiment agrémenter leur propriété de signes ostentatoires par goût et pour montrer leur réussite sociale : on voit alors apparaître des colombiers de taille modeste qui ont un rôle purement décoratif et ne sont pas fonctionnels.
 
Dans notre région, le colombier des temps féodaux a une forme de tour circulaire. Sa toiture est en poivrière, c’est-à-dire conique, et composée d’une charpente à la structure souvent complexe. Elle est parfois surmontée d’un lanternon qui permet à la fois d’apporter de la lumière sous la toiture, d’aérer la volière et de servir d’entrée et de sortie pour ses occupants. C'est un signe distinctif qui se repère bien au loin. Malheureusement, les toitures exposées au vent et aux intempéries sont les premières à se dégrader lorsqu’elles ne sont pas entretenues. Elles sont à l’origine de la lente dégradation de ces édifices.
Utiliser et restaurer
 
Aujourd’hui, les colombiers sont un patrimoine fragilisé : désormais sans fonction agricole et considérées comme inadaptés à toute autre fonction, ils sont souvent délaissés. Trouver un nouvel usage qui ne dénature pas le bâtiment est donc l’enjeu principal pour sauvegarder ces éléments architecturaux remarquables. Par exemple, dans la ferme du château à Mareil le Guyon, le colombier restauré avec l’aide du Parc sera aménagé en chambres d’hôtes ; les formes rondes et les petites fenêtres typiques feront le charme de ces hébergements touristiques. Dans cet esprit, le Parc naturel régional a lancé en 2017 un recensement afin de répertorier les édifices présents sur son territoire. Sur cette base documentée, le Parc peut ensuite mieux cibler et accompagner les restaurations ou les évolutions. C’est aussi l’occasion pour le Parc d’entrer en contact avec les propriétaires et d’apporter son aide technique et financière à ceux qui souhaitent engager des travaux pour préserver ce patrimoine.
 
Image
Colombiers
 
La fonction agricole des colombiers a disparu, tout comme le symbole de pouvoir seigneurial. Mais l’architecture des colombiers et l’empreinte qu’ils laissent dans nos paysages méritent une attention particulière. D’autant qu’ils sont aussi devenus des lieux d’accueil d’une biodiversité riche. Les vieilles poutres et cavités délaissées offrent en effet refuge à de nombreuses espèces végétales et animales. Autant de bonnes raisons de contribuer à l’inventaire participatif qui est toujours en cours et a déjà permis de recenser 40 colombiers sur les 53 communes du PNR.
 
 
Vous souhaitez contribuer au recensement participatif ? a.robinet@parc-naturel-chevreuse.fr
Grâce à Denis Girault, Yvelinois retraité, passionné de patrimoines méconnus et membre d’une communauté web de joueurs de cistes et de géocaching, le Parc a pu enrichir sa base de données des colombiers du territoire. Merci !
 
Vous êtes propriétaires d’un colombier ? Vous avez un projet de restauration ? N’hésitez pas à solliciter les conseils du Parc : a.mahdavi@parc-naturel-chevreuse.fr
 
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